Oscar Henri Ghislain HECQ Un « Croix du Feu » à Forchies-la-Marche

Un « Croix du Feu »
de
Forchies-la-Marche.

Par Alain Arcq

 

Lors de l’exposition du Cercle d’Histoire et d’Archéologie de Fontaine-l’Évêque, à la Maison de la Laïcité de Leernes, Monsieur Leroy D. de Leernes, nous a communiqué des renseignements et certains documents qu’il possédait
sur son grand-père Oscar Hecq, dont le nom figure dans le livre des Cartes du Feu en page 251.
Rassemblant ses documents ainsi que d’autres sources, nous avons voulu rendre hommage à ce héros, tout en faisant pour Monsieur Leroy quelques recherches sur son glorieux ancêtre, preuve s’il en est, que notre Cercle est au service
de tous.
Oscar Henri Ghislain HECQ est né à Forchies-la-Marche le 6 Mai 1890. Fils d’Augustin HECQ et de Éloïse BURY, domicilié à Fontaine-l’Évêque.

Son très long service militaire.

Milicien de la Classe 1910, il effectue son service militaire dans les rangs du 1er Régiment de Chasseurs à Cheval
où la mobilisation d’août 1914 le surprend comme beaucoup de ses amis.
Le 16 août 1914, le régiment est soumis au baptême du feu à Sart-Risbart (Incourt).
La situation est défavorable et le régiment doit céder du terrain face à la supériorité numérique de l’adversaire.
Le régiment coopère ensuite à la couverture de la retraite de l’Armée belge vers l’Yser, cours d’eau que l’unité franchit
le 15 Octobre 1914.
C’est la Bataille de l’Yser qui commence.
Les hommes y serviront tantôt aux tranchées, tantôt en réserve. Une fois le front stabilisé, les cavaliers se battront
à Peruyse (1914), dans le secteur du Fort de Knocke-Labiettehoeck (1915), à Dixmude (début 1916) et ensuite
à Noordschoote-Steenstrete vers le mois de mai de cette même année.
Il occupera ensuite Ramscappelle mi-1916. Il sert dans cette unité comme Brigadier (équivalent de Caporal à la cavalerie)
jusqu’au 25 mai 1916, date à laquelle il est transféré au 2e Régiment de Carabiniers où il ne reste que quelques jours.
Comme Brigadier, il est directement affecté au 4e Régiment de Chasseurs à Cheval (dans le secteur de Ramscappelle) jusqu’au 26 Janvier 1918.
Sa nouvelle unité se battra dans les secteurs connus comme Peruyse, Ramscappelle, Dixmude et Knocke, ou dans
de nouveaux comme Oud-Stuyvekenskerke, Drie-Grachten et Steenstrate, en imposant toujours aux Allemands.

Le régiment devant être dissous en Février 1918, le 27 janvier, il est muté au Groupement Léger de D.A. (Division d’Armée).
Il y effectue son service jusqu’au 9 février 1918 avant d’être transféré à sa dernière affectation, la 49 ème Batterie
du 9 ème Régiment d’Artillerie.
C’est dans cette unité qu’il connaîtra la fin de la Grande Guerre, le 11 Novembre 1918.
Le 9 ème Régiment d’Artillerie fait partie de la 3 ème Division d’Armée qui a mérité le surnom de « DIVISION DE FER ».
Pour quelques détails, nous dirons que le 1er groupe du 9A (I/9A) est composé des 49 ème, 50 ème et 51 ème batteries
montées de 75mm, ce qui porte le nom de 7c5 à l’Armée belge.
Nous comprenons mieux la place de ce cavalier de formation dans cette batterie montée.
Le 9A fait partie de la 9  ème Division d’Infanterie formée sur Arrêté Royal du 24 janvier 1918.
L’ordre du Jour de la Division d’Infanterie en date du 24 Avril 1918 rappelle la qualité et la conduite exemplaire
du régiment.
Cet Ordre (O.J.D.I.) est signé par le Général-Major Baltia, commandant le 9 ème D.I..
Quelques temps plus tard, lors de l’offensive libératrice, le régiment se couvre de gloire par une formidable préparation
d’artillerie sur la forêt d’Houthulet tenue par l’ennemi.
Oscar HECQ sera démobilisé le 10 septembre 1919, après avoir passé neuf années dans l’armée…un très long
service militaire.
Sa fille cadette, Georgine, se souvient qu’il était revenu de Charleroi à pied, passant par le bois de Goutroux pour rejoindre
Fontaine-l’Évêque.
Son matricule était, pour le 9 ème d’Artillerie, le numéro 1501 alors que celui qu’il avait reçu comme jeune cavalier milicien
était le numéro 1224.
Ce numéro a probablement changé avec l’Arme (de Cavalerie à Artillerie).

Sa citation à l’Ordre du Jour du 9e Régiment d’Artillerie.

« Pour le courage et le dévouement dont il a fait preuve au cours de sa longue présence au front. » 23 novembre 1918.

Sa marraine de guerre

Le statut de « marraine de guerre » a été en quelque sorte, créé à l’initiative de femmes, au lendemain de la célèbre bataille de l’Yser.
Il s’agissait de relever ou entretenir le moral des troupes, le plus souvent coupées de leur famille, mais également
d’offrir aux soldats des objets de première nécessité dont ils avaient besoin.
Il fut fait appel à de jeunes femmes et jeunes filles de bonne volonté pour écrire aux militaires bloqués dans les tranchées.
Elles se dévouaient en petit travaux de nécessité et écrivaient des lettres d’encouragement, envoyaient des colis
aux soldats, qu’elles rencontraient parfois lors de leurs permissions.
Je donnerai un seul exemple qui résume tout : Jules Blasse, Médecin durant la Grande Guerre n’oubliait jamais de montrer
le petit papier qu’il avait un jour reçu et qui contenait une paire de chaussettes « Sois fort et courageux, vaillant
soldat belge, la France t’admire. – Yvonne Duclos, 12 ans ».
En 1915, si ces jeunes femmes supportent nos soldats, pour la plupart, elles sont étrangères.
Notre pays étant presque entièrement occupé, nos concitoyennes n’ont pas, ou presque pas de contact avec
nos militaires.
Ce sont les Françaises et les Britanniques qui vont se charger de cette cause importante.

 

 

Oscar HECQ aura une marraine comme beaucoup d’autres soldats.  Elle se nomme Emilie WASHAUX.
L’a-t-il rencontrée lors d’une permission loin du front ?
A-t-il franchit le « Chanel » ?
Nous disposons d’une de ses lettres, ou plutôt d’un mot écrit
en parfait français au dos d’une photographie faite à Londres
chez Basil Portraitial.
Le texte en est simple :
« A mon filleul de guerre et ami Oscar Hecq.
Souvenir d’amitié de sa marraine Emilie Washaux.
Highgate n5 London 31 septembre 1918
».

 

 

Je tiens à signaler la rareté de cette découverte.
Très peu de marraines de guerre ont laissé des traces dans l’histoire de la Grande Guerre.
Chaque fois qu’un filleul s’éteignait, sa marraine de guerre partait vers l’oubli avec lui.
Par contre, en Belgique, le souvenir des « marraines » est encore bien présent dans le coeur des prisonniers de guerre
belges du conflit de 1940 à 1945.
Nombre de jeunes femmes de notre pays ont soutenu le moral de nos prisonniers enfermés de l’autre côté du Rhin.
Certaines idylles ont vu le jour et se sont terminées par un mariage au retour de la libération des camps de prisonniers.
Mais ceci est une autre histoire…

Détail de permission

 

 

Comme beaucoup de soldats belges, c’est en France qu’il passe
ses trop rares permissions.
A-t-il traversé la manche pour voir Londres comme certains
de ses camarades de combat ?
Nous n’en possédons pas la preuve.
Par contre, une photographie indique bien qu’il s’est rendu
à Paris.
En effet, gravée en relief sur cette dernière, l’adresse
de l’artiste photographe :
L. Courbet 171-173 Rue du Temple Paris.
On peut imaginer la joie de la permission tant attendue
dans cette ville de légende !
Et pourtant, il pense à faire une photo qu’il fera parvenir
aux siens, de l’autre côté des lignes ennemies.

 

En 1937, la Maison d’Editions J. ROZEZ, S.A. de Bruxelles, éditait un livre qui devait marquer le souvenir de ceux
qui furent les héros belges de la Grande Guerre : le « LIVRE D’OR DE LA CARTE DU FEU ».
On peut y lire, page 251 : « HECQ Oscar H. Gh. – Fontaine-l’Evêque – Brigadier – 9 ème Régiment d’Artillerie
– 8 Chevrons de front – Croix de Guerre avec Palme – Médaille de la Victoire – Croix de l’Yser – Médaille Commémorative
de la Guerre 1914-1918. »
Il est à noter que bizarrement, aucune photographie n’a été fournie à l’éditeur.
De plus, alors que la majorité des ses engagements sur le front sont aux 1er et 4 ème Chasseurs à Cheval, c’est au 9 ème Régiment d’Artillerie qu’il apparaît.
Il recevra ainsi les décorations suivantes :

– Médaille de l’Yser par décision ministérielle du 30 avril 1919
– Médaille commémorative de la guerre 1914-1918 décernée le 19 septembre 1919
– Croix de Guerre 1914-1918 avec Palme pour citation à l’Ordre du Jour de l’Armée obtenue le 23 novembre 1918, et confirmée par l’Arrêté Royal 8901 du 28 février 1921.
– Carte du Feu n° 3218 décernée le 22 septembre 1936.
– Palme en plus pour la Croix de Guerre en date du 6 novembre 1937, sur décision royale du 21 juillet 1937. (Ceci fera deux palmes sur sa Croix de Guerre).
– Médaille de la Victoire.
– Croix de Feu.

En mars 1913, il épousera Bertha Lucie Joséphine Philomène Pochet, habitant Fontaine-l’Évêque, avec laquelle il aura
quatre enfants, deux filles et deux garçons.
Malheureusement la Grande Guerre viendra séparer ce couple, comme beaucoup d’autres dans notre pays.
Les domiciles retrouvés dans les archives étaient, en 1921, rue d’Henrichamps n° 3 (aussi donné comme n° 1) et en 1920,
rue Jolibois n° 3 tous deux à Fontaine-l’Evêque.
En 1945 il est signalé dans son dossier militaire comme habitant rue de Roux n° 65 en notre ville (où habite sa fille Georgine).
Il reprendra la ferme d’Henrichamps, appartenant à monsieur Dewandre, située à Fontaine-l’Evêque, transformée
aujourd’hui en deux habitations privées.
Une seule de ses filles d’Oscard Hecq est aujourd’hui encore en vie, la plus jeune, Georgine.
Elle est la tante de Monsieur Leroy.
Nous pouvons la voir sur cette photo, prise à la ferme d’Henrichamps par le second fils qui joue photographe.
De gauche à droite et de haut en bas nous pouvons découvrir Georgine, Yvonne, Arthur (l’aîné), son épouse Lucie Pochet
et Oscar Hecq.
Le photographe se nommait Raymond (le plus jeune fils).

Mais Monsieur Leroy possède encore un document exceptionnel de notre histoire locale.
Il est la preuve que la Ville de Fontaine-l’Evêque a mis ses militaires à l’honneur en février 1921.
Document simple et émouvant, affichant le portrait du Roi Chevalier en son centre supérieur, un dessin assez naïf
imprimé chez J.E. COOLS Imprimeur – Editeur à Bruxelles montre les souffrances endurées par les hommes
à qui il rend hommage.

Enfin, pour terminer, les archives familiales contiennent également le texte du « discours prononcé sur la tombe
de l’ancien combattant Hecq Oscar par monsieur Duquesne, Président. »
Ce dernier nous donne quelques détails sur la vie de cet ancien militaire, dont « la vie de forçat qu’il avait subie
dans les boues de l’Yser avait fortement ébranlé la santé.
Depuis plusieurs années, sans une plainte et avec un courage exemplaire, il lutta contre le mal qui le terrassait…»
Malheureusement, sans doute plein de bonnes intentions, monsieur Duquesne s’est trompé dans le tracé de la carrière militaire d’Oscar Hecq.
En effet, il décrit la campagne 14-18 du 9 ème Régiment d’Artillerie, oubliant qu’il était aux 1er et 4 ème Chasseurs
à Cheval jusque janvier 1918.
Comme quoi il ne faut pas toujours se fier à la bonne volonté des gens.
Mais comme le Président Duquesne, nous terminerons cet article en nous adressant directement au héros que fut
Oscar Hecq :
« Repose en paix dans la terre que tu as loyalement défendue. »
Avec nos remerciements à madame HECQ G. et monsieur LEROY D. pour la communication et la mise
à notre disposition de leurs archives familiales.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extrait revue N° 9