L’Église Saint-Christophe, par Roland POLIART

Historique

La ville de Fontaine-l’Évêque possédait deux églises paroissiales dont la paroisse de Saint-Vaast ou Bougnies qui dépendait jadis du diocèse de Liège (ressortissant de la principauté ecclésiastique de Cologne), doyenné de Thuin tandis que Saint-Christophe dépendait du diocèse de Cambrai (relevant de l’archevêché de Reims), doyenné de Binche. La limite de ces paroisses divisait en deux la Grand place de Fontaine.

La paroisse de Saint-Christophe ne fut érigée qu’en 1245 et devint bientôt la principale de la ville. La paroisse Saint-Vaast existait déjà depuis 1211 (Chapelle de Bougnies). La fondation de la paroisse de Saint-Christophe s’explique tout naturellement par le fait que le futur évêque de Cambrai n’était autre que Nicolas, 3ème Seigneur de Fontaine.

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Collection © Roland Poliart

Il était à cette époque déjà l’un des premiers dignitaires du diocèse de Cambrai, et son père (Wauthier II), voulant donner à la Seigneurie dont il portait le nom un accroissement rapide, en construisant un superbe château, en groupant de nombreux vassaux autour de son domaine, puis grâce à l’influence de Nicolas, firent démembrer de la paroisse de Leernes l’église Saint-Christophe à Fontaine-l’Évêque.

Une fois devenue paroisse, cette église probablement chapelle, fut agrandie par les soins des seigneurs. Le seul souvenir de cet édifice primitif pourrait être les moellons qui apparaissent au soubassement du mur gouttereau, à la limite du transept sud, entre la roche du sol et les premières rangées de pierres taillées bien assisées.

L’acte de donation de biens à la nouvelle paroisse date du mois d’avril 1245. Cet acte émane du chapitre de Saint-Usmer à Lobbes et stipule que le seigneur de Fontaine sera tenu à perpétuité à la réparation des grilles, à la provision de livres, ornements et calices au paiement du droit cathédratique (droit levé par les évêques lors de visites d’églises), à la visite du doyen et au chapitre de Saint-Usmer ainsi que le paiement de diverses charges et dîmes.

De nombreuses reconstructions se remarquent sur l’extérieur de l’édifice :

  • les murs refaits partiellement en briques et particulièrement le mur du transept au midi.
  • Les voûtes de la nef droite qui sont dépassées par les axes des fenêtres.
  • Le dernier étage de la tour « tout en briques » et l’avant dernier étage dont une face est également en briques.

L’église était entourée d’un petit cimetière qui subsista jusqu’au début des années 1900.

Confréries et ermites

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Collection © Roland Poliart

Comme la plupart des villes, Fontaine-l’Évêque eut une confrérie ou compagnie d’archers sous le patronage de Saint-Sébastien. Elle était érigée dans l’église Saint-Christophe et avait son jardin au lieu dit « Les Culots ». Les seigneurs de Fontaine ainsi que des membres de la famille de Dampremy en faisaient partie. Cette confrérie qui assistait, chaque année, à la procession solennelle disparu à la révolution, époque ou tous les biens furent vendus comme propriétés nationales.

Deux autres confréries furent établies à Saint-Christophe. La première instituée le 15 décembre 1611 et dénommée Confrérie Notre-Dame du Rosaire et la seconde : Confrérie de Notre-Dame des suffrages ou de la miséricorde envers les trépassés avec statuts approuvés à Mons le 28 octobre 1639.

Au XVIIème siècle, deux ermites étaient établis dans la paroisse de Saint-Christophe ; le premier (cité dans un acte de 1668), frère Martin Delforge demeurant en l’ermitage de Sainte-Rolande et le second, frère Nicolas Gossiau et demeurant à l’ermitage de la Fucillie

Après le concordat et par décret du 16 octobre 1803, l’église Saint-Christophe fut érigée en doyenné, l’ancienne paroisse rétablie et sa délimitation ainsi fixée :

La circonscription de cette Paroisse commence à la porte du Marteau (bas de la rue de Haussy), suit la rue des religieuses (rue de Haussy) jusque la rue Saint-André(rue Benoît Fauconnier) et n’en prend que la droite, suit la rue de Saint-André et n’en prend que la droite, descend la grand rue jusque l’Abreuvoir (environs de l’ancienne poste) et n’en prend que la droite, suit le ruisseau rive gauche de la Babelonne jusqu’au rempart (face à l’ancienne poste jusque la rue de la Babelonne –pas de constructions-), traverse le rempart (rue de la Babelonne) et poursuit la rive gauche du même ruisseau (rue Allende) jusqu’aux limites de la juridiction de la commune de Fontaine-l’Évêque, suit le contour des dites limites, jusqu’au sentier qui se rend de la ville de Fontaine –l’Évêque au Bois de la Charbonnière et suit le dit sentier jusque la Pote du Marteau (départ) en passant par la Croix Favresse.

Son nom

Saint-Christophe étant le patron des voyageurs, Il fut vénéré en Chalcédoine à partir du Vème siècle. Il est probable que l’église eut son origine sur sa situation près d’une voie de communication importante.

Principaux évènements

Pendant plus de 4 siècles l’église va connaître les méfaits de la guerre et tout ce qui s’ensuit.

D’abord en 1408, des villes se révoltèrent contre leur Prince-Évêque Jean de Bavière ; elles demandèrent de l’aide aux bourgeois de Fontaine tandis que le seigneur Baudouin VI de Hennin, 11ème seigneur, soutenait l’Évêque. Cela dégénéra en une véritable guerre locale entre les vassaux et le châtelain. Le château fut incendié par les uns tandis que les autres s’en prirent à la ville. L’hôtel de ville fut incendié et les nefs de l’église Saint-Christophe furent détruites.

Le 21 juillet 1554, après avoir incendiés Mariemont, Trazegnies et d’autres châteaux, les armées françaises de Henri II, roi de France en guerre contre Philippe II roi d’Espagne et souverain des Pays-Bas, se ruèrent sur la ville de Fontaine-l’Évêque. L’église Saint-Christophe fut incendiée et ruinée. Le curé et le mambour(*) vendirent une partie des biens de la paroisse pour pourvoir aux réparations les plus urgentes.

En 1592, on répara la tour de l’église.

En 1604, on dut de nouveau emprunter pour effectuer différents travaux et acheter des ornements, les anciens ayant été volés ou pillés par les hollandais ayant séjourné dans la ville pendant 2 à 3 jours.

En 1609, un terrible orage détruisit entièrement la toiture.

De 1640 à 1670, des conflits, opposant la France de Louis XIV à l’Espagne de Philippe IV et à l’Europe coalisée, font régner de façon quasi permanente en Hainaut, un climat d’insécurité et de détresse. C’est pourquoi, à la moindre alerte, les Anderlusiens couraient se réfugier au plus profond des bois voisins et quand ils le pouvaient à Fontaine-l’Évêque, siège de leur seigneurie et terre franche, où l’église Saint-Christophe les accueillait.

En 1640, plusieurs enfants naquirent même dans cette église où les parents s’étaient réfugiés pour se protéger des armées du Duc de Lorraine. D’autres naissances eurent lieu dans l’église en 1654, 1656 et 1658.

1669 à 1697 : Première occupation française pour la gloire de Louis XIV et l’extension du territoire de la France. Les bourgeois sont pressurés de tant d’exactions que l’église peu entretenue périclite.

En 1685, on doit reconstruire la voûte, prête à s’effondrer, où l’on voit encore la travée et les fenêtres primitives en ogive engagée en partie dans la nouvelle voûte dont trois des clefs portent :

  • les armoiries de Rodoan et d’Ennetières
  • celles de la ville de Fontaine l’Évêque
  • les lettres J.D.P. 1685 Initiales du curé en fonctions en 1685 et qui représentent les trois donateurs qui contribuèrent à la reconstruction de ces nefs.

En 1714, sauvetage de la tour qui menace ruine avec remplacement de l’horloge et remise en état du carillon par Monsieur Martin Robert, horloger demeurant à Nivelles. Suivant le contrat, le tambour du carillon devra jouer les airs aussi vite que celui de Nivelles. À signaler que cette horloge (située dans le clocher) était remontée à la main toutes les semaines jusqu’au début des années 60, année où l’on y installa un système électrique. Auguste Ghislain et Edmond Rectem son gendre ont été les dernières personnes à effectuer ce travail.

En 1765 et 1778, la ville fit réparer les accessoires des tours et clochers dont le carillon.

En 1768, la ville fit arranger les orgues pour 35 écus ; de nouvelles réparations furent réalisées en 1790.

En mai 1794, lors de la révolution française, on pilla la maison du curé.

Le 21 juillet 1794, la ville tomba définitivement aux mains des républicains qui imposèrent une contribution de guerre à la ville de Fontaine l’Évêque.

En plus, les églises furent converties en écuries, les archives paroissiales furent dispersées et les objets sacrés, vendus publiquement.

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Collection © Roland Poliart

Le 26 août, l’église fut dépouillée de vingt et une cloches dont 17 appartenaient au carillon. Elles furent chargées sur des chariots avec celles de Saint-Vaast, des Récollets et de la chapelle du château. Elles furent dirigées sur Mons et remises au dépôt général de la République française. Le transport avait été effectué par Pierre Leroy, fermier d’Henrichamps pour la somme de 14 florins.

Le dimanche 3 mai 1802, en exécution du concordat conclu entre le Saint–Siège et le Gouvernement français, le culte fut rétabli en 1803. La paroisse était administrée par un mambour(*) et quelques maîtres de chapelle. En raison de sa valeur archéologique et historique et conformément aux dispositions de la loi du 7 août 1931, l’église Saint-Christophe fut classée comme monument en 1952. (Moniteur belge du 1er octobre 1952).

1914/18 et 1940/45, deux conflits mondiaux qui ont laissé intacte la ville de Fontaine et son église Saint-Christophe.

Le 12 septembre 1992 à 18h00 en l’église Saint-Christophe, une messe y fut célébrée en l’honneur du départ du doyen Mottoul à Masnuy-Saint-Jean.

Le 11 novembre 1992, suite à une mini tempête, le vitrail situé au-dessus du porche d’entrée fut soufflé vers l’intérieur (derrière les orgues). Les réparations seront effectuées par l’entrepreneur Claude Gérard.

(*) Le terme « mambour » ou « mambourg » est un terme vieilli synonyme de tuteur, curateur. Dans certaines confréries catholiques, se nommait ainsi le trésorier. Il proviendrait du néerlandais « momboor ».

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