La Révolution brabançonne, liégeoise

La Révolution brabançonne,
la Révolution liégeoise…

par Alain ARCQ

 

Peu de personnes connaissent les mouvements populaires qui incendièrent notre pays durant ces années 1789 et 1790. Ces révolutions ne furent pas exclusivement économiques et ou politiques.
L’aspect social y joua un grand rôle.

Ces mouvements populaires allaient donner naissance à la création éphémère des Etats Belgiques Unis, que les Autrichiens auraient tôt fait de balayer au nom de l’empereur Joseph II et de son successeur
et frère Léopold II.

Il faut savoir que la région de Charleroi était partagée entre la principauté de Liège et le comté de Namur. Si Charleroi appartenait au Namurois, Leernes était de la principauté liégeoise. Fontaine, a été rattachée, dès 1757, par le gouvernement des Pays-Bas autrichiens au Hainaut.

Dans la principauté liégeoise, cette révolution fut d’inspiration démocratique et populaire. La philosophie des Lumières, moteur d’un renouveau intellectuel, s’épanouit durant le règne du prince-évêque François Charles de Velbruck (de 1771 à 1784) ; elle entraînera la fuite de son successeur, Constantin François de Hoensbroeck (de 1784 à 1792). L’insurrection commença à Liège le 18 août 1789.

Dans la crise qui nous intéresse et qui devait entraîner ces révolutions, on peut citer l’interdit d’accès qui frappa tous les villages liégeois pour les marchés de Charleroi et de Fleurus (9 mai 1789). L’approvisionnement en grains était compromis. Rappelons que les récoltes de 1784 à 1789 avaient été de vraies catastrophes, la disette menaçait la région.

 

 

 

 

En ce qui concerne les combats qui devaient nous apporter une liberté temporaire et relative, on peut citer le 27 octobre 1789, date où l’armée de Van de Mersh bat les Autrichiens à Turnhout, après cinq heures de combats de rues. Charleroi verra passer les troupes impériales le 9 novembre, alors qu’elles se replient de Mons sur Namur. Le 13 novembre, commandés par le jeune prince de Ligne, nos rebelles prennent Gand La cocarde tricolore noir, rouge et jaune apparaît sur toutes les coiffures. L’indépendance du Hainaut est déclarée le 21 décembre de cette année.

 

 

 

 

 

Pour cette fin d’année, tous les Pays-Bas autrichiens à l’ouest de la principauté de Liège sont
« libérés  et indépendants ».

Revenons justement à cette principauté et à ce que l’Histoire nous a laissé sous le nom
de « Heureuse Révolution ».

Dans ces contrées, la Révolution prend un caractère nettement démocratique.
Le Tiers état reprend le principe de la représentation des campagnes de la principauté, principe qui oblige à une proportionnalité entre le produit des impôts et le chiffre de la population. Le 9 mai 1790, le Tiers rédige à ce sujet un décret organisant les élections. La principauté est divisée en 23 districts et le quartier d’Entre-Sambre-et-Meuse en est composé de cinq. Le premier comprend Bouffioulx, Farciennes, Loverval, Montignies-sur-Sambre, Presles et Pont-de-Loup ; le second Biesmes-sous-Thuin, Couillet, Landelies, Leernes, Lobbes, Marchienne-au-Pont, Monceau, Montigny-le-Tilleul et Mont-sur-Marchienne ;
le troisième Gozée, Marbaix, Ham-sur-Heure, Fontaine-Valmont, Leers-et-Fosteau, Marcinelle, Nalinnes, Jamioulx, Ragnies, Strée, Thuillies et Ossogne. Les deux autres sont plus éloignés de notre région.

D’après le décret précité, l’élection doit se faire en deux degrés.
Chaque village ou groupe de villages choisit à la « pluralité relative des suffrages » en « électeur ».
A le droit de participer à ce scrutin tout chef de ménage, « homme ou femme, ecclésiastique ou séculier » habitant le village depuis un an au moins.
L’électeur n’avait d’autre condition à remplir que d’être lui-même admis au vote dans son village.
Ces élections primaires devaient être terminées pour le 1er juin. Treize jours plus tard devaient avoir lieu les élections secondaires. Tous les « électeurs » devaient se réunir au « chef-lieu » de leur district,
c’est-à-dire pour nous, Montigny-le-Tilleul. Si des retards furent consignés, il semble que les dates furent respectées dans le second de nos cinq districts. L’assemblée secondaire semble s’être tenue à la date fixée et le 14 juin, nos concitoyens apprenaient que le choix du district s’était porté sur l’électeur
de Mont-sur-Marchienne, Charles François THOMAS.

Cet homme, comme son collègue d’Ham-sur-Heure, est désigné « sans limitation de pouvoir mais en l’obligeant de nous informer de tout ce qui s’opérera pour le bien-être de la nation et de représenter tous les griefs du district et d’insister avec tous les Seigneurs ses collègues pour en avoir le redressement ». Charles François THOMAS est admis à l’Etat le 24 juin, et siège sans interruption jusqu’au 26 novembre.

 

 

Pendant cette période révolutionnaire, les habitants de Fontaine firent des patrouilles en soutien de la police, dans le but d’éviter tout acte de malveillance. On dit que le Magistrat donna même une demi-tonne de bière à chaque escouade pour encourager ces patrouilles (lire demi-tonneau). Rendues ensuite obligatoires par le seigneur de Fontaine, on défendit aux gens de tirer des coups de feu, de chanter, de s’enivrer, etc., sous peine d’amende. La ville offrit, par décision du 27 mars 1790, une gratification de deux couronnes impériales à ceux des habitants qui s’enrôleraient dans l’armée des patriotes et ce « en sus de l’engagement ordinaire du régiment ».

 

 

 

 

Le 29 novembre, on ordonna aux habitants de mettre de la lumière aux fenêtres de l’étage de leur habitation depuis 5 heures de l’après-midi jusqu’au lever du jour et ce, afin de faciliter les patrouilles.

Durant ce temps, nos soldats continuent à remporter des succès sur les Autrichiens, le 17 juin 1790
à Freyer, le 31 août à Dinant et le 3 septembre à Coutisse.

La bataille décisive se livra à Monniat, près de Waulsort le long de la Meuse. Après plusieurs heures
de combat, l’armée des Etats Belgiques Unis doit reculer et ainsi s’achève notre éphémère
république fédérale. Notre Congrès national siège pour la dernière fois à Bruxelles le 27 novembre 1790. Cinq jours plus tard le général Bender et ses troupes impériales entrent dans cette ville et, Léopold II, empereur magnanime, reprend le pouvoir en pardonnant aux Belges leurs erreurs.
Il ira même jusqu’à ne jamais imposer la conscription militaire et consulter nos Etats provinciaux
sur tous les problèmes d’intérêt national.

Sources bibliographiques

  • J.-L. DELAET, Libre-sur-Sambre, Charleroi sous les Révolutions 1789-1799, ouvrage coordonné par Crédit Communal septembre 1989.
  • Roger DARQUENNE, Le Centre sous les révolutions et l’Empire (1787 à 1814), Cercle d’Histoire Henri-Guillemin, La Louvière, Haine-Saint-Pierre 1992.
  • Jo GERARD, La prodigieuse révolution belge de 1789, Editions J.M. Collet, 1983.
  • G.H. DUMONT, Histoire de la Belgique, France Loisirs, Librairie Hachette, 1977.
  • S. THIBAUT, Histoire et Souvenirs de Mont-sur-Marchienne, Ed. SOGEDI, Couillet, 1931.
  • J.A.S. PARÉE, Histoire de la Ville de Fontaine-l’Evêque, Ed. Ville de Fontaine-l’Evêque.
  • A.-G. DEMANET, Recherches historiques sur la ville et la seigneurie de Fontaine-l’Evêque, ED Culture et Civilisation, Bruxelles, 1982.

 

 

 

 

 

 

 

 

Extrait revue N° 2